Le beurre et l’argent du beurre…et la CAA Lyon du 9 février 2023
L’acquisition de l’usufruit temporaire d’immeuble par une société d’exploitation qui l’occupe pour les besoins de son activité est un schéma qui, selon ses conditions financières, peut présenter un réel intérêt économique pour l’exploitant.
Plus délicate est la situation d’un transfert de l’usufruit de parts d’une SCI à l’impôt sur le revenu à une autre SCI ayant opter à l’impôt sur les sociétés, dès lors que cette dernière n’exerce pas de réelle activité économique. L’administration fiscale y a vu un abus de droit et la Cour d’Appel Administrative de Lyon a confirmé cette analyse.
Le schéma remis en cause porte sur la cession de l’usufruit de parts d’une SCI à l’IR à une société à l’IS, les associés de la première devenant nus-propriétaires des parts transférées.
Ainsi, la SCI démembrée va être imposés à l’IS pendant la durée de l’usufruit à durée fixe (déduction des charges, amortissements…) et non plus à l’IR selon les règles des revenus fonciers.
A l’extinction de l’usufruit, les associés récupèrent la pleine propriété des parts et reviennent au régime des plus-values immobilières des particuliers en cas de cession des parts de la SCI, avec une durée de détention depuis la création de la société.
Au cas présent, la Cour d’Appel Administrative relève que la SCI devenue détentrice de l’usufruit est dénuée de substance économique et que sa création ne répondait pas à un motif économique, financier ou patrimonial :
· Elle n’a réalisé aucune transaction financière en lien avec son objet,
· Les attestations produites ne suffisent pas à démontrer l’existence d’une activité de gestion de titres,
· La SCI détentrice de l’usufruit ne dispose ni de compte bancaire, ni de comptabilité et elle n’a tenu aucune assemblée générale !
Outre des intérêts de retard et des pénalités de 40 ou 80 %, la qualification en abus de droit permet à l’administration fiscale d’opérer des redressements sur deux plans :
- les revenus non perçus par les nus-propriétaires sont rétroactivement imposés à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux au titre des revenus fonciers,
- La réintégration dans l’assiette IFI de la pleine propriété des parts de la SCI.
Afin de limiter le risque d’abus de droit fiscal, il est préférable de limiter ces opérations aux parts de SCI détenant un immeuble d’exploitation et de céder l’usufruit au profit de la société qui utilise cet actif.
A défaut d’immeuble d’exploitation, les éléments suivants devraient être présents :
- Substance économique étayée par la réalisation d’opérations significatives,
- Substance financière, comptable et juridique : tenir ses assemblées générales, sa comptabilité, disposer d’une trésorerie, d’un compte bancaire.
- Préoccupations d’organisation patrimoniale familiale (donation-partage à venir par exemple) ;
- Capital de la société usufruitière détenu par des associés différents des nus-propriétaires.